dimanche 11 février 2018

Homélie du 6ème Dimanche année B - Journée des malades



Homélie du 6ème Dimanche année B - Journée des malades
Carmel de Saint-Maur —Père Maurice Boisson

           
            C’est la saison des rhumes, des grippes et de quelques autres maux dont les microbes se transmettent. « Je ne te donne pas la main, je ne t’embrasse pas, je vais te contaminer ! »

            Quand on parle de contagion, il s’agit le plus souvent de transmission de quelque chose de mauvais : « Tu vas attraper mon rhume ! »
            Et si ce qui est bien, ce qui est bon et agréable se transmettait aussi ? Et si le bien était encore plus contagieux que le mal ? C’est ce que nous dit l’Évangile de ce dimanche. La contagion du bien est plus forte que celle du mal. Nous avons du mal à y croire et c’est dommage! Nous serions encore plus portés à faire le bien.

            Un homme est atteint d’une maladie contagieuse, qui le ronge, la lèpre. Il est inapprochable, intouchable, isolé, à l’écart de la vie sociale. Sa situation est très réglementée, jusqu’à son habillement et ses cheveux, comme le décrit la première lecture. Il n’avait pas le droit de s’approcher de Jésus. Il est malheureux. Il a entendu parler de Jésus. Il a confiance qu’il peut faire quelque chose pour lui. Alors, il franchit l’interdit ! « Si tu le veux, tu peux me purifier ! » Jésus n’a pas le droit de toucher cet homme, au risque de devenir impur lui-même, d’enfreindre la loi et d’être contaminé. Jésus est ému jusqu’aux entrailles, dit le verbe grec. En langage populaire, on dirait « il est pris aux tripes ». Alors, il franchit l’interdit : touché au plus profond de lui-même, il touche l’intouchable…
Il franchit les barrières de l’exclusion, du rejet, de la maladie, de la loi religieuse pour poser un geste et dire une parole de guérison, non seulement sur la peau rongée de cet homme mais sur toute sa personne. Un geste et une parole inspirés non seulement par l’émotion et le sentiment mais par la volonté consciente de faire le bien : « Je le veux, sois purifié ! » « Aussitôt, la lèpre s’éloigne de lui », le quitte. Le mal s’éloigne au contact du bien.

            La nuit ne peut jamais éloigner la nuit, seuls la lumière, le jour peuvent chasser les ténèbres. Faire ou dire le mal ne peut enlever le mal. Seuls les gestes de bien, de bon, de vrai, de beau peuvent chasser le mal. C’est une question de contagion. De quoi suis-je contagieux ?

            Cet homme, contagieux de la lèpre n’a pas contaminé Jésus. C’est lui qui a été touché, qui "a attrapé de la santé" , du bien, de la santé intérieure !

            Alors que Jésus lui défend de parler de ce qui lui est arrivé, simplement pour ne pas parasiter l’essentiel de la mission de Jésus dès le début, cet homme se met à répandre la nouvelle. Ce qui est devenu contagieux, ce n’est pas la lèpre mais la guérison, la vie et les relations retrouvées, les barrières tombées, sa relation à Dieu reconnue, puisque sa maladie était signe du péché. Le Bien est plus contagieux que ce qui est mauvais et méchant. On croit trop que c’est le contraire, et on nous le fait croire. C’est sans doute plus visible, plus médiatique. Soyons contagieux du bien, du beau, du bon, de l’essentiel, du goût de vivre ensemble dans la paix, de la joie profonde, intérieure, de la sérénité, de la force dans les passages difficiles. C’est meilleur pour tous, et c’est plus fort que les lèpres qui peuvent ronger notre propre intérieur, encore plus qu’elles peuvent contaminer les autres : pour le lépreux, pour Jésus, il a fallu franchir des barrières pour que s’éloigne le mal, dit notre Évangile, et que le sain, revenu chez le lépreux guéri soit communicatif.

            Au fond, Jésus aurait pu se contenter d’un regard de pitié, d’un petit geste et d’un petit mot à distance : « J’ai pas le droit, je ne peux rien faire, mais je te plains… » Mais, « Il le toucha. » « Je le veux, sois purifié ! » On ne peut pas prendre à la lettre ce geste de Jésus. Il y a tant de manières de se faire proche, d’accueillir, d’aimer, de respecter, de soutenir, sinon de guérir, d’éloigner ces lèpres, ce qui peut faire du mal aux autres et du même coup à soi-même et à Dieu, c’est tout un. Nous sommes ce lépreux, chacun à sa manière, approchons-nous du Christ : « si tu le veux, tu peux me purifier ». Laissons-nous toucher par sa grâce et nous serons contagieux, tout simplement au quotidien, dans l’ordinaire, non pas des lèpres qui abiment et pourrissent la vie mais des grâces, c’est-à-dire des beautés, des bontés, de l’Amour, des dons de Dieu qui donnent à la vie un bon goût de Dieu et d’humanité et de vie.

            « Saisi de compassion, Jésus le toucha. Aussitôt, la lèpre s’éloigna de lui. »

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